Quelles réponses à la malnutrition et l'appauvrissement du microbiote en Afrique ?

05/07/2024
Le projet FAMA ou Food And Microbiota in Africa a été lancé le 4 juillet 2024 à Pretoria en Afrique du Sud, en réponse au triple fardeau de la malnutrition caractérisée par les carences en protéines et en nutriments ainsi que l'obésité et l’appauvrissement du microbiote humain en Afrique. Ce projet s’intéresse à des systèmes alimentaires alternatifs, reposant sur les aliments traditionnels africains. Il vise à mieux connaitre le rôle des aliments traditionnels dans le microbiote et à promouvoir leur production par des pratiques agroécologiques ainsi que leurs transformation, distribution et consommation. Le projet s’inscrit dans le cadre de l’initiative Transformer les systèmes alimentaires et l'agriculture par la recherche en partenariat avec l’Afrique (TSARA). Il est porté par l’Ambassade de France en Afrique du Sud avec le financement du Ministère français des Affaires étrangères et implique le Cirad, INRAE, l'université de Prétoria, l'Université du Cap-occidental, l'African Research council (ARC), le Council for scientific and industrialised research (CSIR) et le laboratoire LARTES-IFAN de l'Université de Cheick Anta Diop, en collaboration avec l'ONG Siyazisisa Trust et le groupe privé Puratos.

Les participants au lancement du projet FAMA © EYEscape corporate phohtography

Carences en protéines, carences en micronutriments, surpoids/ obésité, ces trois éléments composent le triple fardeau de la malnutrition en Afrique. Le régime alimentaire actuel des populations sudafricaines, sous l’effet de l’urbanisation, est généralement constitué d’aliments faciles à préparer et faibles en nutriments. Les populations s’en trouvent menacées par un risque d’accroissement de l’obésité et d’explosion des maladies non transmissibles liées à l’alimentations.  Par ailleurs, l’appauvrissement du microbiote humain affecte considérablement le système immunitaire, rendant les populations plus vulnérables aux maladies, générant des répercussions importantes sur l’augmentation des coûts de santé publique.

Production de connaissances et amélioration des systèmes alimentaires impliquant les décideurs politiques

Le constat du triple fardeau de la malnutrition et de l’appauvrissement du microbiote a conduit les chercheurs à s’intéresser à des systèmes alimentaires alternatifs à ceux qui prédominent aujourd’hui. Son objectif est de mieux connaitre le rôle des aliments traditionnels dans le microbiote et à promouvoir leur production par des pratiques agroécologiques ainsi que leurs transformation, distribution et consommation. Une ambition qui s'aligne avec certaines politiques nationales en Afrique qui s’attachent à promouvoir l’agroécologie et les aliments traditionnels dans une perspective de souveraineté alimentaire.

Le projet FAMA est mis en œuvre pour une durée de 2 ans (2024-2025). L’ Afrique du Sud est le principal pays étudié, le Sénégal est pris comme point de comparaison. Les activités favoriseront une approche inclusive des systèmes alimentaires, avec une attention particulière portée aux jeunes, aux femmes et à l’introduction de pratiques agroécologiques permettant de renforcer la résilience des systèmes de production face au changement climatique.

Les actions du projet s'articulent autour de trois composantes scientifiques :

1. Produire des connaissances sur les aliments traditionnels africains qui sont bons pour la nutrition et la santé.

Dans cette composante, les actions se concentreront sur l’exploration des associations entre la consommation d’aliments traditionnels et le microbiote humain.

2.  Tester avec les acteurs du système alimentaire certaines actions pilotes qui permettent d’augmenter l’offre de ces aliments à un prix abordable.

Cette deuxième composante se penchera sur la création et la diffusion d’innovations agroécologique pour améliorer le système de production des aliments traditionnels et également le développement de procédures standards pour les tests de qualité et de sécurité au niveau de la transformation de ces aliments.  

3. Identifier les instruments politiques qui pourraient soutenir les systèmes alimentaires basés sur les aliments traditionnels

Cette troisième composante vise à cartographier et analyser le contexte politique, institutionnel et idéologique composant la gouvernance des aliments traditionnels et le microbiome humain. Elle cherchera également à sensibiliser les décideurs politiques et représentants de l’Etat sur l’importance des aliments traditionnels africains et l’implication de l’Etat dans leur promotion.

Une quatrième composante concerne la communication et le management. Elle intègre les actions de sensibilisation qui permettront aux consommateurs d’être mieux informés sur l’intérêt des aliments traditionnels africains pour leur nutrition et leur santé.

Une diversité de bénéficiaires concernés

Une diversité d’acteurs bénéficiera des différentes activités et des résultats de recherche du projet FAMA :

  • Une vingtaine de petits exploitants agricoles, principaux producteurs d’aliments traditionnels africains bénéficieront d’un soutien de l’ONG Siyazisisa Trust et de l’ARC pour améliorer leurs pratiques suivant une approche agroécologique.
  • Au moins 80 boulangers de Chipkins Puratos seront formés pour améliorer la formulation de leur pain en utilisant les résultats de la recherche sur le microbiote intestinal
  • Au moins dix petites et moyennes entreprises (PME) transformant des aliments traditionnels africains seront consultées pour identifier les contraintes d’approvisionnement et réfléchir à des solutions pour les surmonter. Elles participeront également à l’évaluation de technologies de transformation améliorées.
  • Les dialogues entre science et décision permettront d'éclairer les décideurs politiques au niveau local et national sur le renforcement des politiques en faveur de systèmes alimentaires fondés sur les aliments traditionnels africains.
  • A travers les sensibilisations, les consommateurs seront mieux informés sur l’intérêt des aliments traditionnels africains pour leur nutrition et leur santé.

Le projet FAMA est conduit dans une approche interdisciplinaire faisant intervenir différents domaines de recherche tels que la microbiologie, la nutrition, la science des aliments, la technologie alimentaire, la sociologie et l’économie politique. Les analyses porteront sur différents niveaux : le niveau nano, avec l’étude du microbiote intestinale, le niveau micro, avec la compréhension des besoins nutritionnels des individus et sous-groupes de population, le niveau méso touchant l’environnement alimentaire des consommateurs et les filières alimentaires, et enfin le niveau macro en s’intéressant aux politiques publiques et à la gouvernance des systèmes alimentaires.

Un projet mené avec des partenariats solides basés sur l’initiative TSARA

David Martinon, Ambassadeur de France en Afrique du Sud durant le lancement du projet FAMA © EYEscape Corporate Photography

Le projet FAMA s’inscrit dans le cadre de l’initiative TSARA - Transformer les systèmes alimentaires et l'agriculture par la recherche en partenariat avec l’Afrique, regroupant 26 institutions africaines, le Cirad et INRAE. Ce projet est porté par l’Ambassade de France en Afrique du Sud avec le financement du Ministère français des Affaires Etrangères. Il regroupe sept partenaires de recherche français, sudafricains et sénégalais :

  • de l’ (LARTES-IFAN UCAD)

Deux autres organisations ne venant pas du monde de la recherche, toutes deux basées en Afrique du Sud, complètent ce partenariat :